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Stratégies agro-écologiques du renforcement de la résilience pour la sécurité alimentaire et nutritionnelle en RDC

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Professeur Kizungu Roger

I. Introduction

En République Démocratique du Congo, 70 % de la population vit de l’agriculture. Visiblement, ils ne créent pas des richesses et leurs champs servent pour l’auto subsistance. Depuis les années 20 du siècle passé, les Institutions d’enseignement et de recherche ont vulgarisé auprès d’eux les pratiques agricoles dites modernes, fondées sur l’économie d’échelle et qui semblent incompatibles avec les champs à petite échelle. Ces pratiques absorbent plus de la moitié des recettes dans les charges sur l’achat des semences, des engrais, des pesticides et du carburant. Le système de production les rend ainsi très vulnérables face aux moindres chocs dans l’approvisionnement en ces intrants. Il en résulte souvent des pénuries alimentaires à répétition souvent sur les grandes cultures commerciales. Devant ce drame, ces agriculteurs ne semblent développer aucune stratégie pour s’en sortir (Kasongo, 2009).

Depuis les années 60 du siècle passé, l’agro-écologie est proposée comme une alternative sur fond de l’économie de gamme (Kizungu 2012, Rosset, 1999). Elle offre des stratégies pour augmenter la productivité agricole tout en préservant l’environnement. Dans la gamme des solutions proposées aux agriculteurs pour assurer la sécurité alimentaire et nutritionnelle, le Système d’Exploitation Agricole Intégré (SEAI) est conseillé par plusieurs auteurs (Johansen 2019, Archer D.W., et al. 2018, Vinodakumar 2017, Koumar 2012). Sa variante, dite « permaculture », apparait prometteuse en tant que pourvoyeuse des services éco-systémiques qui assurent la résilience du fermier contre les chocs économiques, écologiques ou sociaux. (Mollison 1981, Conrad 2014, Ferguson 2015, Morel 2016, Broustey 2018).

La régénération de la nature (de l’eau, du sol, de la biodiversité, de la biomasse, des aliments), selon, Ben Fak en 2013, est le fondement de la résilience du système de la vie. Elle permet l’anticipation des chocs, la viabilité économique. Elle procure la santé et rend agréable la vie communautaire. Elle assure l’autonomisation, et favorise la productivité. Elle est observée ou favorisée par peu de personnes marginalisées. Symétriquement, elle est bafouée par une majorité qui semble convaincue qu’à n’importe quel prix, au nom du business, il suffit d’exploiter à outrance les ressources naturelles sans se soucier d’elle pourvu que cela procure l’argent, la richesse, maintenant, immédiatement (Fak, 2013).

En 2014, l’anthropologue Conrad a montré que, dans le cadre de la permaculture, la diversification des cultures et donc l’accès à la diversité des aliments entraine directement l’amélioration de la nutrition, du régime alimentaire et de la santé. Elle est indirectement à la base de l’amélioration du revenu et donc de la résilience (Conrad 2014). Dans le même cadre, Fergusson (2015) a montré que la diversification de la production à six cultures au moins en association avec l’élevage, dans un système intégré, permet à une micro-ferme de près d’un hectare de dégager durablement un revenu équivalent au salaire minimum garanti dans les conditions des USA (Fergusson, 2015). Morel confirmera ces résultats en 2016 en réalisant 52 000 euros par an, en 42 heures de travail par semaine, avec plus de trente espèces cultivées dans les conditions de disponibilité de matière organique à Paris en France sur un dixième d’un hectare et (Morel 2016).

Deux questions restent cruciales. La première est de savoir quelles sont les conditions pour anticiper et atténuer les impacts des chocs économiques, écologiques et sociaux ? La deuxième est celle de connaitre comment créer les conditions d’adaptation aux risques liés à l’agriculture, à la nutrition, à l’insécurité alimentaire et sanitaire des aliments en temps opportun et de manière efficace.

L’objectif de ce travail est de rapporter les stratégies existantes, soutenues scientifiquement, et qui débouchent sur la résilience, l’adaptation, l’atténuation des chocs par les fermiers.

Dans une approche de durabilité, le premier point de notre étude évoque les stratégies écologiques en vue de régénérer l’environnement. Le deuxième présente les stratégies techniques en vue d’augmenter la production sur les petites surfaces. Le troisième donne les stratégies économiques en vue d’accroitre la valeur ajoutée de la production. Dans un dernier point, nous présentons les besoin de recherche sur les actions et les connaissances en vue de renforcer la résilience pour la sécurité alimentaire et nutritionnelle.

II. Stratégie écologiques et la régénération de l’environnement

Les paragraphes qui suivent vont expliquer comment quand un fermier, premièrement mime la nature, deuxièmement se connecte à cette nature et troisièmement raisonne de manière holistique son dispositif de production, il régénère son environnement et devient résilient.

2.1. Exploiter la biodiversité sur 7 strates, verticalement comme fonctionne une forêt naturelle

La stratégie de placer l’exploitation sous le régime d’une biodiversité minimale comme la monoculture a fait preuve de ses performances mais le fermier paye cher pour la maintenir. Elle met l’agriculteur en position de fragilité face aux chocs économiques et écologiques (Kizungu 2012). Celle d’installer un champ de maïs et de maïs seulement qui s’étend sur plus de 1000 ha est inadaptée aux 70% de personnes engagés en agriculture et qui sont caractérisés par un faible accès aux infrastructures et aux facilités (terres, crédit, formation, santé, organisation communautaire) et un mauvais environnement de production (mauvaises routes, pas d’irrigation, non accès au marché, lois peu protectrices).

En revanche, dans une micro-ferme, une exploitation de la verticalité et une production simultanée, en rotation, en association et en relais, d’une biodiversité sur 7 strates sont plutôt conseillées. La première strate est souterraine. Le fermier installera les tubercules, les bulbes, les racines et les rhizomes. On peut citer sans être exhaustif, le manioc, la patate douce, l’Igname, l’arachide, l’Ail, l’Oignon, la Carotte, le Navet, le Gingembre. La deuxième strate s’étend sur une vingtaine de centimètres au-dessus du sol. Elle peut être colonisée par les légumes feuilles, les plantes aromatiques, les légumineuses, les cucurbitacées. On peut citer l’Amarante, la Baselle/ Epinard, le Chou de chine, le Chou-fleur, la Laitue, la Morelle, l’Oseille, le Céleri, la Ciboule, la Ciboulette, le Basilic, la Citronnelle, la Menthe, le Haricot vert, le Petit pois, le Poids cajan, le Vigna, le Niébé, le Concombre, la Courge, la Courgette, le Pastèque, le Melon. La troisième strate peut commencer à une cinquantaine de centimètres au-dessus du sol. Cette strate est celle des légumes fruits comme l’Aubergine, le Gombo, le Piment, le Poivron, la Tomate. La quatrième strate, celle de la centaine centimètres au-dessus du sol est celle des céréales comme le Maïs, le Riz. La cinquième strate est celle qui atteint 3 à 5 m au-dessus du sol. On cite les agrumes, les goyaviers, les jacquiers. La sixième strate va jusqu’à plus de 10 m au-dessus du sol. Il s’agit des gros arbres comme l’avocatier, le manguier, le safoutiers, les spondias, les cocotiers. La septième strate est transversale et va de 0 à 30 m pour les lianes comme le maracuja.

Produire de manière permanente (perma-culture) rend le fermier résilient pour la sécurité alimentaire et nutritionnelle. En effet, aucun bio agresseur n’est capable de ravager simultanément toutes les espèces. Pour y arriver, il faut regarder autrement la nature.

2.2. Se reconnecter à la nature et la régénérer

L’homme, dans l’agriculture moderne, conventionnelle fonctionne suivant le paradigme de l’économie d’échelle, productiviste de tendance capitaliste. Il ne vise qu’à rémunérer au maximum le facteur de production, capital financier, au détriment des autres capitaux (Physique, Humain, Nature, Social). Il a fait ses preuves mais s’est détaché de son environnement dans l’Anthroposcène (Morel 2016). Il a artificialisé les écosystèmes. Il s’impose de ce fait l’obligation de devoir compenser par son travail et par son temps, les fonctions remplies naturellement dans le sol par les vivants comme les vers de terre, les collemboles et les termites. Depuis quelques décennies, les voies s’élèvent pour suggérer à cet homme une économie de gamme. Il lui est suggéré de se reconnecter à la nature, de s’inspirer du fonctionnement des écosystèmes naturels, d’agir avec la nature et non contre elle. Il économiserait en temps et en travail. Sa ligne de conduite et son éthique consistent premièrement de régénérer la terre à savoir son sol, sa biodiversité, son atmosphère, ses eaux, ses forêts etc. Deuxièmement, prendre soin de l’homme. Lui procurer l’énergie (nourriture), le déplacement et l’abri (logement, travail, rapports sociaux, éducation). Le replacer au sein d’un système durable, c’est-à-dire équitable socialement et économiquement, viable socialement et écologiquement, vivable écologiquement et économiquement. Un système globalement durable, résilient (Broustey, 2018).

Dans ce système multifonctionnel, la ferme, en plus de sa fonction nourricière, devient un lieu pédagogique où l’éducation à l’environnement et à la santé, la reconnexion, la réconciliation des humains avec la nature, la biosphère, y compris à leur nature profonde, le lien social constituent aussi une récolte (Mollison, 1981). Dans ce système, l’évolution des habitudes alimentaires vers des produits plus sains, plus gouteux, locaux et de saison deviennent aussi une récolte.

Dans ce système il s’agit de créer un agro écosystème qui deviendra de plus en plus fertile, diversifié, résilient et productif au fil des ans. Il ne s’agira pas de corriger un déséquilibre (massacrer les ravageur…), pour éviter d’en générer un autre par effet rebond, et souvent de laisser l’équilibre s’instaurer naturellement et de la faciliter (apparition du prédateur du ravageur…).

Il faut toutefois veiller à l’équilibre économique à court terme de la ferme, de manière à franchir le cap toujours difficile des premières années, et planifier en conséquence l’installation des éléments qui ne sont « rentables » qu’à long terme : plantation d’arbres fruitiers, de haies, creusement de mares…, en fonction des possibilités d’autofinancement (Broustey, 2018).

Dans cette logique, l’agriculteur se considère humblement comme un co[1]créateur, tout le programme de vie d’une plante étant contenu dans la graine (Broustey, 2018). L’homme a pour rôle, dans cette attitude, simplement de favoriser son épanouissement en faisant le meilleur usage des éléments naturels : soleil, eau de pluie, azote et carbone atmosphériques, éléments minéraux de la roche mère… Il cherche à mettre à profit les fonctions remplies naturellement et gratuitement par les écosystèmes (services écosystémiques) : auxiliaires utiles, fourniture de matière organique,mise à disposition d’éléments minéraux par les arbres…, plutôt que d’artificialiser la nature et devoir ensuite compenser par des intrants ou du travail. Il va donc essayer de créer une oasis de vie féconde et durable, qui produira localement une nourriture de qualité et bien davantage : de la beauté, une reconnexion à la nature, du lien social. L’homme participe ainsi à la guérison de la planète et contribue à l’équilibre du monde.

2.3. Penser son dispositif en permaculture

Un fermier en permaculture se fixe quatre objectifs : (1) créer l’autosuffisance en nourriture, en énergie, en argent, en logement et ainsi être moins dépendant d’achats des produits et d’énergie et donc être moins sensible aux chocs économiques, à la variation des prix des denrées alimentaires ; (2) produire des aliments sains pour des corps en meilleure santé et être ainsi moins vulnérable à la malnutrition ; (3) créer une éco-entreprise et (4) régénérer, moins polluer et préserver tout en vivant du site.

Son attitude est : (a) de transformer ses problèmes en solutions (ne pas produire les déchets mais les recycler) ; (b) d’intégrer et non de séparer les composantes de sa ferme, (c) de commencer petit (Une fois l’étape contrôlée, alors étendre) ; (d) de répondre créativement au changement ; (e) utiliser les motifs de la nature dans sa planification ; (f) se mettre à l’abri des conditionnements de l’environnement (télévision, école, environnement social) ; (g) éviter les dogmes ou de régime imposé.

III. Les stratégies techniques ou les stratégies pour augmenter la production sur les petites surfaces

On part du principe que les grands systèmes décentralisés sont consommateurs de transport et d’espace. Selon Agricultural Census (1992), ils produisent dans les conditions des USA, 18 560 $/ha/mois de bénéfice brut et 3500$/ha/mois de bénéfice net dans une ferme de 1.6 ha (4 acres) mais seulement 156$/ha/mois de bénéfice brut et 30 $/ha dans une ferme de 2 684 ha (6600 acres) (Rosset, 1999). Dans le Katanga, , un grand fermier exploite 3000 hectares de maïs, produit 5 tonnes par hectare et vend la tonne à 700 $. C’est une production de 10 500 000 $ sans compter les charges. Ce chiffre fait rêver et est souvent brandit comme modèle à suivre. En réalité il s’agit d’une production de 292 $/ha/ mois car la production est annuelle. En considérant les charges, on n’est pas loin des chiffres de Rosset (1999). En revanche, si 3000 micro-fermes étaient installées durablement, en produisant 3500$/mois/ha, on aurait 126 000 000 $. Or dans les conditions d’installation des micro-fermes, le labour seul occuperait par hectare 40 personnes (normes de l’INERA) soit une création d’emplois pour 120 000 personnes pour les 3000 hectares. Et si on considère qu’un hectare peut nourrir durablement 25 personnes alors les 3000 ha nourriraient 75 000 personnes sans penser un seul jour à une pénurie alimentaire.

Pour augmenter la production sur de petites surfaces il faut augmenter la production par unité de surface et par unité de temps.

3.1. Les stratégies pour accroitre la production par unité de surface.

3.1.1. Effectuer des cultures en grande densité

L’approche intensive de l’agriculture tournée vers la monoculture a fait ses preuves dans les conditions de grande disponibilité des terres. Néanmoins, le constat est que les espaces entre les rangs de plantes cultivées, dans une approche mécanisée de l’agriculture, sont dictés en partie par les besoins physiologiques des végétaux, mais aussi par la nécessité de circuler entre les rangs (passe-pieds, passages de roues) et de désherber (largeur des outils…). Il y a lieu, dans les conditions de rareté des terres, de densifier les cultures en supprimant les petits « déserts » de terre à nu entre les rangs, porte ouverte au lessivage et aux adventices. Le système gagne en efficacité et en durabilité.

3.1.2. Effectuer des cultures en association ou la polyculture

Les associations de culture (de 2 à 4 légumes cultivés simultanément) sont pratiquées à chaque fois que possible. Ces associations sont rendues possibles par le travail réalisé à la main. Elles favorisent une culture intensive dans l’espace.

L’un des intérêts des associations de cultures est qu’à effort quasiment égal (préparation du sol, fertilisation, désherbage, arrosages…), on bénéficie de plusieurs récoltes au lieu d’une.

Il suffit de prendre en compte le fait que les plantes, les arbres, n’ont pas les mêmes besoins en eau, en lumière et en nutriments. Ils ne soutirent pas les nutriments aux mêmes endroits : les uns superficiellement, les autres en profondeur (Broustey 2018).

L’association des cultures se fait aussi en cultures étagées (Broustey 2018).

3.1.3. Prêter une grande attention aux cultures,

La main de l’homme remplace la machine. L’intensité des soins par la main est liée à la productivité. En effet, une attention portée sur les cultures peut permettre de constater un besoin urgent en eau ou la présence des prédateurs. Une action rapide est en ce moment vite engagée avant que la productivité ne soit hypothéquée.

3.1.4. Créer des micro-climats.

La conception de la ferme accorde une grande importance à la création de microclimats bénéfiques aux cultures.

Par les paillages : Les paillages remplissent plusieurs fonctions (fertilisation, protection du sol, diminution des adventices, amélioration de la rétention d’eau dans le sol). Il contribue à la résilience face aux poches de sécheresses de la saison des pluies.

Par les arbres : les arbres stockent du carbone, créent un microclimat et remplissent de nombreuses fonctions écologiques tout en donnant des récoltes savoureuses et excellentes pour la santé. (Haies fruitières, forêt jardin, vergers-maraîchers, pré-verger…).

Par la biodiversité résiduelle : la biodiversité remplit diverses fonctions écologiques, rend le système plus résilient face aux aléas climatiques et participe à la sauvegarde du patrimoine naturel mondial. La diversité doit être pensée en termes de coopération : certaines espèces acceptent une vie en symbiose d’autres entrent en compétition.

Par la bordure : la bordure est l’interface entre deux éléments, eau-terre, forêt-pâturage. Elle est caractérisée par une écologie riche car ses habitants utilisent les deux qualités des deux milieux.

Par les sols y compris les allées : les sols doivent progressivement devenir aussi vivants et naturels que possible. Les allées remplissent plusieurs fonctions : espaces de circulation, mais aussi de compostage. Nous constatons une rapide création d’humus dans les allées qui permet de recharger périodiquement les buttes de cultures.

3.1.5. Créer les buttes des cultures permanentes et autofertiles

La culture en buttes permanentes autorise une densification des cultures. Les buttes arrondies, ne nécessitant que peu de travail une fois mises en place. Elles sont généralement paillées et le compostage en place des mulchs s’effectue. Ces buttes arrondies servent le plus souvent aux repiquages de jeunes plants démarrés sous abri. Les planches plates, de 80 -120cm cm de large, généralement peu ou pas mulchées, qui servent le plus souvent aux semis en place.

3.2. Les stratégies pour maximiser la production par an.

3.2.1. Produire en toute saison

La production en toute saison est matérialisée par la disponibilité l’accès, des produits des micro-fermes à tendance agro écologiques. C’est le cas du maïs et des arachides frais en toute saison. Il s’agit de la disponibilité des principaux légumes feuilles et fruits.

Il y a lieu de changer de paradigme dans la production et favoriser une agriculture ne dépend pas du cycle es pluies.

3.2.2. Organiser les rotations des cultures

Une bonne rotation des cultures est fondamentale pour la santé des plantes et du sol. Elle permet une culture intensive dans le temps (Broustey 2018).

Les vertus de la rotation de cultures sont connues. Elles désorganisent les cycles des insectes et des maladies et contribuent à la résilience face aux chocs écologiques.

3.2.3. Organiser les relais des cultures.

Dans le temps, planter à des échéances différentes. Un fermier, qui a comme objectif la production des aubergines qui occupe le sol pendant trois mois, peut planter les amarantes qui seront disponibles un mois après et succédés par les oseilles qui prendront aussi un mois avant que les aubergines ne se déploient. Ces cultures associées couvrent le sol, créent un microclimat qui rend le système résilient.

Le grand défi est la connaissance des plantes amies et d’organiser les fiches de ces successions pour plus de trente espèces.

IV. Stratégies économiques ou Les stratégie pour accroitre la valeur ajoutée de la production.

Les technologies qui accroissent la valeur ajoutée de la production sont celles qui permettent de sauver l’argent en évitant au maximum certaines opérations culturales budgétivores. Il s’agit de promouvoir la vente à circuit court et la limitation des intrants.

4.1. La vente à circuit court pour éviter les coûts de transport et augmenter les marges,

Traditionnellement, toute personne qui commence à s’installer en agriculture se pose la question sur son débouché. La pratique permaculturelle conseille la considération du marché local, les clients de proximité. Cela a l’avantage de diminuer les charges. Un maraicher qui produirait des paniers prêts pour la cuisine d’une diversité des légumes et qui fournirait à 5$/panier à 15 voisins les plus proches (moins d’un kilomètre) dans les conditions périurbaines est à un chiffre de 2250$.

4.2. La limitation de l’utilisation des intrants

Les intrants dont fait face l’agriculteur à savoir les semences, les engrais, les pesticides sont souvent importés et donc pas sous son contrôle. Une fluctuation de leurs prix entamerait la production. L’alternative est l’utilisation des ressources biologiques comme carburant, fertilisant (mulch, paillage), pour contrôler les insectes, les mauvaises herbes, (Broustey, 2018). Il y a lieu de favoriser la production de la biomasse organique. L’agriculteur doit apprendre à produire une partie au moins de ses semences dans sa la ferme.

4.3. La limitation des charges de travail

La culture en grande densité, en association, permet une gestion de mauvaises herbes et diminue la charge d’arrosage. Le paillage limite le labour, l’arrosage et les adventices. L’utilisation d’un bon matériel et des outils appropries permet un travail efficace et un gain en temps.

4.- Besoin de recherche sur les actions et les connaissances en vue de renforcer la résilience pour la sécurité alimentaire et nutritionnelle

Nos institutions de recherche agronomiques et nos Facultés des sciences agronomiques ont privilégié pendant des années des études sures : (1) la sélection et l’amélioration des cultures et des géniteurs, (2) la défense des cultures, (3) l’agronomie. Il est souhaitable de renforcer les études sur (4) la transformation et la conservation des produits animaux et végétaux dans l’optique des échanges de biomasse entre les différentes composantes du système de production agricole intégré et (5) les études socio-économiques sur la bonne caractérisation des fermiers, leur accès aux facilités et l’amélioration de leur environnement de travail.

Une recherche sur la dynamique de la faune et de la flore souterraine et ses services éco-systémiques est très attendue.

Les fermiers voudront bien savoir comment régénérer la vie du sol, les vers, les microorganismes, les mychorhizes. Ils souhaitent savoir comment créer, augmenter la matière organique, corriger le pH, améliorer la structure du sol, combler les manques éventuels en éléments nutritifs, dynamiser la vie dans le sol et donc éviter l’appauvrissement du sol et l’achat des engrais (Broustey 2018).

  1. Conclusion

Cette communication a présenté les recommandations pour renforcer la résilience du fermier et donc sa sécurité alimentaire et nutritionnelle. Le maintien de la biodiversité, l’exploitation de la verticalité dans le champ, l’imitation de la nature et la planification du dispositif en permaculture sont identifiées comme stratégie écologique pour assurer la résilience aux chocs économico-écologiques. Les cultures en grande densité, en association, en polyculture, l’attention aux cultures, la création des microclimats, la mise en place des buttes des cultures sont les stratégies techniques pour accroitre la productivité par unité de surface. La production en toute saison, l’organisation des rotations des cultures et les relais des cultures sont les stratégies pour augmenter la productivité par unité de temps. Ces stratégies assurent la résilience face aux chocs socio-écologiques. La vente à circuit court, la limitation des charges de travail (culture en grande densité, en association, limitation du labour, de l’arrosage et les adventices, l’utilisation des matériels et outils appropriés) sont les stratégies socioéconomiques proposées.

Installer durablement 3000 ménages agricoles sur 3000 hectares et qui pratiquent le Système d’Exploitation Agricole Intégré procure un retour à l’investissement 12 fois plus grand qu’installer une personne avec de gros engins sur la même superficie et qui pratique l’agriculture conventionnelle. Rosset (1999), Ferguson (2015) Morel (2016) en ont donné les preuves académiques tandis que Johansen 2019, Archer D.W., et al. 2018, Vinodakumar 2017, Koumar 2012 donnent les expérimentations à échelle de fermier replicable et adaptables dans des cas particuliers. Cette nouvelle facon de faire l’agriculture a du succès en Inde, en Asie et en Amérique latine. Elle est à la portée de tout petit propriétaire foncier et prêt à habiter même partiellement sa concession.

Dans le premier modèle la consommation alimentaire est assurée. La diversité alimentaire est garantie. La justice alimentaire est établie. La résilience pour la sécurité alimentaire et nutritionnelle est consolidée.

Plutôt que d’installer un parc agro-industriel exclusif et calqué sur des modèles non reproductibles, il est recommandé d’organiser les villages existants en garantissant une superficie de 1 hectare à chaque ménage agricole et en organisant leur développement en 4 dimensions à savoir la dimension économique, la dimension écologique, la dimension sociale et la dimension culturelle. Favoriser la résilience c’est faciliter le développement global pour le long terme.

Roger Kizungu Vumilia Directeur Scientifique INERA

Source : LA RESILIENCE ALIMENTAIRE ET NUTRITIONNELLE EN REPUBLIQUE DEMOCRATIQUE DU CONGO LES ACTES DES CONFERENCES DE 2019 A L’UNIVERSITE DE KINSHASA ET L’UNIVERSITE MARISTE DE KISANGANI (Fondation Konrad Adenauer Stiftung)

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