RDC : L’ASADHO INTERPELLE LES PROFESSEURS D’UNIVERSITES
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Le Papyrus publie la lettre adressée aux Professeurs d’universités par le président national de l’ASADHO pour les inviter à plus d’implication dans la vie nationale.
ASADHO B.P.16737 KINSHASA 1 R.D. Congo Association Africaine de Défense des Droits de l’Homme African Association for the Defence of Human Rights Kinshasa, le 16 juillet 2019
Aux Professeurs des Universités de la République Démocratique du Congo. R.D.CONGO
N/Réf : 047 /ASADHO/CE/JCK/FD/2019
Concerne : Notre part de vérités aux Professeurs des universités de la RD Congo Mesdames et Messieurs les Professeurs ;
Au nom de l’Association Africaine de défense des Droits de l’Homme, ASADHO en sigle, nous nous faisons le devoir de vous adresser le présent courrier pour partager avec vous nos préoccupations au sujet du rôle que vous êtes appelés à jouer dans la situation politique, économique et sociale actuelle que traverse notre pays. Nous tenons à saluer le rôle significatif que vous avez joué en formant plusieurs générations de Congolaises et de Congolais dans les différentes universités de notre pays dans des conditions socio-professionnelles particulièrement difficiles. En tant qu’intellectuels de premier plan, votre rôle ne se limite pas seulement à former les élites dont le pays a besoin. Vous avez aussi une grande responsabilité sociale envers la société congolaise dans laquelle vous évoluez.
L’article 22 de la Déclaration de Kampala de 1990 sur la liberté intellectuelle et la responsabilité sociale des intellectuels va dans ce sens quand il dispose que « Il incombe à la communauté intellectuelle de faire sienne la lutte des forces populaires pour leurs droits et leur émancipation, tout en y prenant part ».
Malheureusement, depuis bien longtemps, mais particulièrement depuis 2001, à part quelques exceptions, vous, professeurs des universités de la République Démocratique du Congo, avez failli à votre responsabilité sociale.
Vous avez été absents de toutes les luttes que les Congolais ont mené pour : – obtenir la révision des contrats miniers en 2007 ; – s’opposer à la révision de la Constitution en 2011, – exiger le respect de la Constitution par Monsieur Joseph KABILA et sa Majorité présidentielle ; – dénoncer la corruption et les antivaleurs à tous les niveaux, y compris dans vos universités ; – dénoncer les différents massacres perpétrés à Beni et dans l’espace Kasaï ; – exiger l’organisation des élections dans le délai prévu par la Constitution ; – dénoncer la répression dans le sang des manifestations pacifiques.
Au lieu de vous impliquer dans ces luttes du peuple congolais, vous vous êtes focalisés sur le monnayage des syllabus, la multiplication des « diplômes politiquement obtenus », la pratique des « points sexuellement transmissibles », et sur les revendications tournées plus vers l’augmentation et la perception régulière de vos primes ainsi que d’autres avantages du corps académique. La lutte des forces populaires pour la démocratie ou l’Etat de droit a été absente de vos préoccupations.
D’autre part, les différents pouvoirs politiques ont utilisé plusieurs d’entre vous afin d’asseoir leur pouvoir autoritaire, justifier les tentatives de révision de la Constitution et les différentes violations des droits dont de nombreux Congolais, particulièrement les jeunes , ont été les principales victimes.
Le positionnement politique et les intérêts financiers, matériels ou tribaux vous ont divisés au point que vous n’êtes plus capables de défendre ce qui est juste et bon pour l’ensemble du peuple congolais. Beaucoup d’entre-vous sont devenus de promoteurs ou des avocats de leurs provinces ou tribus au sein des universités, alors que notre peuple attendait de vous un message d’unité et de cohésion nationale.
Si la société congolaise a échoué et perdu ses repères, c’est aussi à cause de votre démission et même de votre trahison.
Vous êtes tous plus préoccupés par votre devenir personnel que par le devenir collectif ou national. Cette recherche de la réussite personnelle n’a même pas permis à beaucoup d’entre vous d’être reconnus au plan international ou mondial. Trop peu d’entre-vous sont capables de publier des articles d’une grande rigueur scientifique dans les revues ou magazines de renommée mondiale. Aucune université congolaise ne figure actuellement parmi les 150 premières en Afrique. Comme corps, vous avez globalement échoué votre mission.
Vous êtes nombreux dans les partis politiques et institutions publiques, qu’est-ce que vous y faites pour que le Congo se porte mieux ? Vous y agissez comme tout le monde, avec toute légèreté, alors que vous êtes sensés être la lumière du Congo, les modèles des intellectuels congolais. Vous êtes ceux qui devraient inspirer notre jeunesse pour qu’elle se batte pour plus de démocratie et de justice pour tous.
Nous tenons, cependant, à féliciter et à remercier certains d’entre vous dont les professeurs André Mbata, Norbert Kampetenga, Philippe Kaganda, Arnold Nyaluma, Denis Mukwege, Thierry Landu, Kambayi Bwatshia, Jean-Louis Esambo et Paul René Lohata pour leur engagement dans la lutte du peuple Congolais pour réclamer une vraie démocratie participative.
Mesdames et Messieurs les Professeurs,
Aujourd’hui, le Congo est confronté à des défis qui nécessitent une mobilisation générale des intellectuels et spécialement des universitaires. Parmi ces défis, il y a :
- Les institutions judiciaires qui sont incapables de rendre une justice juste et équitable ;
- Les acteurs politiques et sociaux tournés plus vers la satisfaction de leurs besoins sociaux que ceux du peuple ;
- La corruption et l’impunité généralisées ;
- La pauvreté et le chômage ;
- La délinquance juvénile ;
- La banalisation de la vie ;
- Les tentatives de balkanisation de notre pays ;
- Le tribalisme, le régionalisme et les conflits ethniques ;
- La répartition injuste des richesses nationales ;
- La consolidation de l’Etat de droit.
Pour relever ces défis, votre engagement est incontournable. Nous vous invitons à initier des actions de nature à relever ces défis ou à participer activement à celles qui seront initiées par les citoyens ou les organisations de la société civile.
Nous espérons que cette interpellation vous permettra de vous organiser pour faire entendre votre voix, de participer aux luttes du peuple congolais et à assumer ainsi votre responsabilité sociale conformément à la Déclaration de Kampala et à d’autres instruments que vous aviez adoptés vous-mêmes lors de certaines de vos rencontres au niveau national ou continental.
On devient complice du crime qu’on ne dénonce pas, a dit Cécile Fée.
Veuillez recevoir, Mesdames et Messieurs les Professeurs, mes salutations patriotiques.
Pour l’ASADHO
Me Jean Claude Katende
Président National