Dre Matshidiso Moeti : « Les inégalités qui désavantagent les femmes se sont exacerbées depuis le début de Covid-19 »
4 min readLe 8 mars de chaque année, le monde célèbre la Journée internationale de la femme pour reconnaître les réalisations des femmes et faire le point sur les progrès vers l’égalité hommes-femmes.
Le thème retenu pour la manifestation de cette année est « Leadership féminin : pour un futur égalitaire dans le monde de la COVID-19 ». La pandémie de maladie à coronavirus 2019 (COVID-19) a mis en lumière l’efficacité du leadership des femmes en temps de crise, notamment en tant que cheffes d’État, en tant que responsables de haut rang, expertes et porteuses d’innovations, en tant que cheffes d’entreprise, en tant que personnel de santé en première ligne (d’autant plus que les femmes représentent 70 % des effectifs de ce personnel exposé à un risque accru d’infection) et en tant que responsables de familles et de communautés. Les femmes ont relevé ce défi avec courage et honnêteté, en apprenant et en s’adaptant à une situation qui évolue rapidement.
Parallèlement, les inégalités qui désavantagent les femmes se sont exacerbées depuis le début de cette pandémie. Les mesures imposant aux populations de rester chez elles ont paralysé les moyens de subsistance de nombreuses femmes africaines – qui officient comme coiffeuses ou comme vendeuses sur le marché, par exemple. Les confinements, les craintes d’infection et les pénuries de personnels de santé figurent parmi les raisons qui expliquent les baisses enregistrées dans l’accès à la contraception, aux soins prénatals et aux naissances dans les établissements de santé au Nigéria, au Zimbabwe et dans d’autres pays. Ces restrictions, y compris la fermeture des écoles, ont aussi accentué les risques de violence sexuelle et sexiste, de grossesses chez les adolescentes et de déperdition scolaire, surtout chez les filles.
La pandémie de COVID-19 aura des effets négatifs à long terme sur le tissu social et économique de nos sociétés, notamment sur les progrès vers l’égalité hommes-femmes. Selon les projections d’ONU-Femmes, huit millions de femmes de plus que les hommes seront poussées dans l’extrême pauvreté en Afrique subsaharienne en 2021.
L’OMS fournit des orientations et un appui technique aux gouvernements pour assurer la prestation continue de services essentiels tenant compte des questions de genre et évaluer les obstacles auxquels les filles et les femmes sont confrontées dans l’accès à ces services. Trente-six États Membres de la Région africaine ont intégré au moins une mesure tenant compte des questions de genre dans leur plan national de riposte à la COVID-19. Nous avons formé 155 agents de santé dans 22 pays africains afin de soutenir les femmes victimes de violence sexiste et de continuer à fournir en toute sécurité des services de santé sexuelle et reproductive et de lutte contre le VIH dans le contexte de la COVID-19.
À l’OMS, nous restons déterminés à œuvrer pour que les femmes puissent évoluer dans leurs carrières et pour accroître leur potentiel en matière de leadership. Plus de 80 membres du personnel féminin de niveaux intermédiaire et supérieur de la Région ont ainsi participé à une formation aux fonctions de direction et d’encadrement, et nous expérimentons l’extension de cette formation à des femmes en service dans les ministères de la santé. En République du Congo, 34 femmes à la tête d’établissements de santé primaires décentralisés ont participé à ce programme de formation.
L’année dernière, nous avons lancé l’Initiative des jeunes championnes d’Afrique en partenariat avec le Programme des volontaires des Nations Unies, afin de recruter 100 volontaires des Nations Unies dans la Région africaine. Malgré les immenses défis inhérents à la riposte à la COVID-19, 27 volontaires sont déjà recrutées, à 93% des femmes, et plus de 20 volontaires seront intégrées dans les mois à venir.
Les femmes représentent désormais 33 % de nos effectifs, contre 30 % en 2015. Nous avons institué un programme de mentorat et un groupe de travail pour créer un cadre de travail plus propice à l’épanouissement des femmes membres du personnel de l’OMS dans la Région.
Pour conclure, en cette Journée internationale de la femme, j’invite chacun d’entre nous à reconnaître les compétences de leadership et le potentiel des femmes, ce qui nous rapprochera de l’équité hommes-femmes. Surmonter les inégalités dans nos sociétés induira une meilleure santé, ainsi que le développement et la prospérité pour tous.
Dre Matshidiso Moeti, Directrice régionale de l’OMS pour l’Afrique